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C’est le printemps et le soleil réchauffe enfin nos visages et toute cette neige (que nous avons encore en abondance dans l’Est du Québec) ! Avec les premières récoltes de la saison qui se pointent le bout du nez, j’ai eu envie de vous emmener dans les coulisses de la récolte éthique, de ce qu’elle implique.
La cueillette sauvage est à la mode, mais on ne pourra mettre suffisamment d’emphase sur l’importance de la pratiquer avec respect et bienfaisance!
La nature sauvage est un garde-manger riche en saveurs et en textures, une pharmacie généreuse et puissante, mais aussi un écosystème complet dans lequel notre place se retrouve au même titre que celle de tous les autres organismes qui le composent. Pour moi, récolter une plante sauvage pour la consommer, me guérir, teindre ou fabriquer des choses est un privilège, un geste sacré qui doit être fait avec une considération beaucoup plus large que son simple aspect éthique. C’est un geste qui doit être fait avec respect, une véritable rencontre avec d’autres organismes vivants, avec qui un échange est possible.
On ne s’aventure pas n’importe où pour récolter! Les parcs nationaux et les lieux de conservation sont des endroits où il est interdit de cueillir ou de prélever quelque élément naturel que ce soit. Si vous tombez sur une belle talle lors d’une randonnée dans un parc national, dites-vous que vous n’êtes certainement pas les premiers à la trouver! Si chaque personne se permettait d’en faire la cueillette, il ne resterait plus grand chose au bout d’un certain temps… Considérez plutôt sa rencontre comme un privilège, un grand cadeau qui vous permet de l’observer, de humer ses parfums… et laissez-la pour les prochains passants!
De la même manière, si vous êtes sur un terrain privé, assurez-vous d’avoir obtenu la permission du propriétaire avant d’y effectuer votre cueillette. Si ce n’est pas possible ou que vous ne savez pas qui est le propriétaire, allez voir ailleurs!
Cueillir la plante pour ensuite l’identifier? Mauvaise bonne idée! L’environnement dans lequel la plante a grandit contient des indices précieux et on ne souhaite pas cueillir sans savoir le statut de la plante, son type de croissance, son importance dans l’écosystème.
Certaines plantes sont plus faciles à identifier que d’autres. Avant de se lancer, une familiarisation avec les notions de botanique sont des outils essentiels pour ceux qui souhaitent devenir de bons cueilleurs! On prend le temps d’observer la tige, la feuille, sa disposition, l’inflorescence, la racine, et même, avant de cueillir, de suivre la plante dans la saison, d’observer comment elle évolue dans l’année, quelle est sa relation avec l’écosystème. Lorsque je vais récolter une plantes sauvage, ce n’est pas qu’une plante que je récolte, c’est un être vivant. C’est quelqu’un. Lorsqu’on a cette approche, on assume qu’on prend quelque chose (et parfois la vie) à un autre être vivant. Cette vision est cruciale pour apprendre cette empathie et ce respect envers le reste du vivant, une empathie qui s’acquiert en prenant le temps d’apprendre à connaître la plante, pas seulement sur le plan intellectuel, mais aussi en la côtoyant, en observant son cycle, sa manière de s’exprimer, sa relation avec les autres organismes.
Il n’y a pas de short-cut: s’outiller de sources variées d’identification et apprendre à aiguiser son sens de l’observation prend du temps, de la patience et beaucoup de curiosité, mais au bout du compte, on développe un sens de connexion profonde, une relation étroite avec la plante qui rend sa récolte oh combien précieuse!
Voici quelques livres d’identification que j’aime transporter avec moi en forêt: les guides d’identification Fleurbec (différents livres portant sur différents écosystèmes, je choisis celui qui m’accompagnera selon où je vais!), La petite flore forestière du Québec, Les arbres du Canada, Arbres et plantes forestières du Québec et des Maritimes, Usage autochtone des plantes médicinales du Québec, et bien plus!
** Dans les dernières années, on a vu apparaître des applications qui permettent d’identifier les plantes à partir d’une simple photo prise avec un cellulaire. Ce n’est pas du tout une bonne manière de développer son sens de l’observation et il faut tout de même valider l’information avec au moins deux autre sources afin de rester prudent (de mon expérience, ce genre d’application nous donne une piste à suivre plutôt qu’une identification sûre) !
D’une région à l’autre, on ne récoltera pas les mêmes plantes de la même manière! Une plante que l’on retrouve en abondance dans un région peut se retrouver en quantités très restreinte lorsqu’elle se trouve à la limite de sa distribution. Si je ne retrouve pas plusieurs colonies en santé sur mon territoire, je m’abstient de faire de la récolte sur les quelques rares spécimens qui se retrouvent dans ma région. Cet individu exceptionnel deviendra plutôt l’ambassadrice de son espèce, une représentante qui me permettra de la rencontrer, la côtoyer, l’observer et apprendre à l’identifier. Peut-être que d’autres amis cueilleurs de d’autres régions y auront accès en plus grande quantité, créant de belles opportunités d’échange!
À ce jour, 78 espèces sont classées parmi les espèces menacées ou vulnérables au Québec et font l’objet d’une protection totale ou partielle. Leur commercialisation est interdite (En voici la liste ici !) Pourtant, plusieurs entreprises et cueilleurs continuent de commercialiser et d’encourager leur achat. Parmi celles-ci figurent le ginseng à cinq folioles, le gingembre sauvage, la cardamine carcajou, la sanguinaire du Canada, l’uvulaire à grandes feuilles et l’ail des bois.
Si vous croisez une plante à statut précaire, appréciez le privilège qu'est la rencontre de ces espèces rares! C'est un grand cadeau qu'il faut protéger à tout prix pour que les futures générations aient la chance de goûter à toutes ces saveurs et cette médecine à leur tour. " Wow. J'ai vécu ça et je vais m'en rappeler toute ma vie. "
Certaines plantes ont une croissance lente, ne produisent leurs graines qu’après de nombreuses années de croissance ou ne se renouvellent pas suite à une récolte. Le chaga et le lichen sont des exemples d’espèces à croissance lente. La trille, par exemple, est une espèce vivace qui prend 25 ans avant de produire ses graines. Ce sont des cas particuliers où on s’arrête pour se demander « Oh! Est-ce que j’en ai vraiment besoin? » Parfois, réaliser que la plante à récolter est plus vieille que moi (et même parfois plus vieille que mes parents) est très efficace pour ralentir l’enthousiasme à la récolte et laisser place à l’admiration et au respect!
Sur le long-terme, est-ce que ma récolte risque de dégrader la biodiversité?
Encore une autre bonne raison de bien s’informer sur les plantes avant d’en faire la récolte! Alors que certaines espèces jouent un rôle central dans leur écosystème, il est aussi possible de croiser des espèces exotiques envahissantes en pleine forêt.
C’est le cas de la renouée du Japon et du phragmite commun, qui poussent souvent au bord de l’eau, ou de l’alliaire officinale, une plante exotique qui impose une forte compétition au ginseng à cinq folioles, dans nos érablières (si tu te souviens, une de nos plantes à statut précaire listée ci-haut).
Travailler en faveur de l’écosystème, c’est donc de respecter l’importance écologique de chacune des plantes de manière à ne pas prendre plus que sa part dans le cercle du vivant. C’est aussi parfois de profiter de l’abondance qu’offrent ces plantes exotiques envahissantes! En faire la récolte de manière plus intensive est une autre manière d’avoir un impact bénéfique sur l’écosystème tout en partageant l’abondance avec les autres.
** Attention dans ce cas de ne pas disperser les graines de ces envahissantes dans d’autres environnements !
L’impact de notre récolte sur la plante ne sera pas le même si on prélève la fleur, les feuilles, les jeunes pousses ou les racines.
Il est important de garder en tête que lorsqu’on récolte la racine, on prend souvent toute la plante. Et si certains bulbes et rhizomes peuvent être divisés, on préfère (quand c’est possible) récolter les sections aériennes de la plante de manière à laisser le système racinaire intact.
Les feuilles et les pousses doivent être cueillies avec parcimonie pour que la plante puisse continuer sa croissance et sa photosynthèse tandis que les fleurs et les fruits peuvent être récoltés en abondance, sans avoir d’impact négatif sur la survie de la plante. Gardons malgré tout en tête que ces fruits et ces fleurs font aussi partie de l’alimentation des animaux, oiseaux et insectes. Il faudra aussi laisser à la plante suffisamment de graines pour qu’elle puisse se reproduire!
Avant la récolte, on veut s’assurer que la plante nous sera vraiment utile. Assurons-nous de ne prendre que ce qui sera utilisé et transformé de manière à éviter le gaspillage.
Si c’est une plante à croissance lente, est-ce que je peux la remplacer par une autre plante qui est plus abondante? Une plante qui prend 20 ans à fleurir, par exemple, n’est certainement pas une plante qu’on peut se permettre de prend au quotidien. Un peu de respect!
Le chaga a connu une poussée en popularité incroyable ces dernières années. Alors qu’il a des actions puissantes bien spécifiques pour certains cancers, la mode est au café de chaga… On en fait alors une poudre pour la machine expresso, de manière à remplacer le café… Oui, le court passage de l’eau chaude dans la poudre de chaga donnera un goût qui rappelle le café, mais ne permettra malheureusement pas d’en extraire ses précieux composés actifs! Au lieu de gaspiller une ressource précieuse à croissance lente, les adeptes de café végétal devraient plutôt utiliser des racines de pissenlit grillées, un vrai délice qui pousse en abondance et qui est parfaitement renouvelable. Le chaga pourrait être conservé pour ceux qui en ont réellement besoin!
Enfin, une bonne récolte se fait en étant à l’écoute de la situation particulière de la plante. Si on évite de faire des cueillettes à un endroit où quelqu’un d’autre est déjà passé, on prend aussi le temps d’observer si la plante est en mesure de fournir ce dont nous avons besoin. Est-ce que des insectes sont passés? Des chevreuils? Est-ce que la plante a déjà assez donné? Est-ce que les conditions météo sont difficiles et qu’elle peine déjà à faire ses ressources?
Souvent, les plantes à la mode sont récoltées massivement et de manière sauvage pour être utilisées dans des récoltes commerciales. La récolte des têtes de violon ne fait pas exception à la règle (pas plus que le chaga, d’ailleurs) , avec un marché de plus en plus important au local comme pour l’exportation. Pourtant présente en abondance, la pression exercée par l’industrie est constante et bien que les cueilleurs s’entendent pour ne prélever pas plus que le tiers des crosses de fougères sur un même plant, il arrive que plusieurs cueilleurs différents passent dans une même talle, l’un après l’autre. Un trop grand prélèvement affaiblit la plante qui peine à faire sa photosynthèse, produisant des feuilles de plus en plus petites jusqu’à mourir, dans certains cas.
Arriver sur une talle où j’allais régulièrement pour découvrir un site ravagé est l’une des choses les plus tristes et décevantes à vivre en nature. Respectons nos ressources. S’il faut marcher plus pour trouver des sites intacts, marchons plus.
Prenons le temps de connaitre la plante et d’entrer en relation avec elle avant même de penser à aller la récolter. Goûtons-la, observons-là, commençons par une petite récolte pour l’expérimenter, la transformer, la tester sur soi et sur les autres, prendre le temps échanger sur son effet, son goût, ses particularités, de manière à se familiariser avec elle longtemps avant de vraiment l’adopter. En réussissant à bâtir une relation solide, on apprend à avoir une meilleure appréciation de nos ressources locales, on apprend à vouloir en prendre soin.
Si toutes les étoiles sont alignées et que vous allez de l’avant pour la récolte, assurez-vous de poser les gestes suivants:
Ne récoltez pas seulement sur les plus beaux et gros plants! En récoltant les plus beaux spécimens seulement et laissant les plus faibles, vous ne travaillez pas à améliorer la génétique de l’espèce, bien au contraire!
Préférez faire vos récolte sur des plants matures plutôt que sur des petits plants qui commencent à bâtir leurs réserves.
Ne faites jamais de récolte intensive sur un nombre réduit de plants. Préférez brouter une feuille par ci, un bourgeon par là. Mon mot d’ordre? Idéalement, ma récolte ne devrait même pas paraître!
Ne récoltez jamais la pousse terminale du plant. Préférez cueillir les petites pousses ou les bourgeons latéraux afin de permettre à la plante de continuer sa croissance.
Au lieu de casser la branche, utilisez de bons outils (couteaux, sécateurs, ciseaux, …) qui permettent de faire des coupes franches. En favorisant une meilleure cicatrisation, vous évitez que la maladie ne s’installe.
Lorsque cous coupez une tige ou une branche, effectuez toujours votre coupe au dessus d’un noeud ou d’un bourgeon afin permettre à la plante de générer de nouvelles pousses suite à la blessure. Les branches d’arbres doivent être coupées perpendiculairement à son axe, à quelques centimètres du tronc.
Récoltez ce qui s’offre à vous. Des branches sont tombées par terre suite à de grands vents? Profitez-en pour tout récolter! Même chose pour les arbres qui devront être coupés ou les sites qui sont déjà condamnés.
N’effectuez pas vos récoltes sur les chemins de fer, sur le bord des routes ou sur les sites qui risquent d’être contaminés. Certaines plantes accumulent les toxines!
Pensez toujours à vos enfants et petits enfants! Est-ce que vous risquez d’avoir un impact négatif sur le long terme?
Après les récoltes, retournez sur vos sites de cueillette pour constater votre impact. Est-ce que la colonie va bien? Est-ce qu’elle continue de croître? Un peu à la manière que vous entretenez vos amitiés, on va les visiter une fois de temps en temps, pour prendre des nouvelles et savoir comment ils vont!
Si on prend des ressources du territoire, il faut donner en retour. En échange d’un bon repas ou d’un remède, faire des efforts pour protéger le territoire et sensibiliser les gens est la base pour cultiver une relation mutuelle avec la nature. Assurez-vous de remercier les plantes qui vous ont donné!
Avec toutes ces considérations en tête, imaginer une récolte commerciale durable est bien difficile! L'impact d'une récolte sauvage entant qu'individu ne peut être comparée à une récolte commerciale, qui a d'énormes enjeux éthiques. C'est la principale raison pour laquelle nous préférons cultiver nous-même la grande majorité des plantes qui sont utilisées dans la formulation de nos produits et que les rares produits sauvages que nous désirons offrir sont disponibles en quantité limitée seulement.
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